Le Maroc à l’ère de la GenAI, Comment l’Intelligence Artificielle redéfinit les préférences de travail

Le paysage mondial du travail est en pleine mutation, secoué par les avancées technologiques rapides, notamment l’intelligence artificielle générative (IA Gen), les tensions géopolitiques et les changements démographiques. Dans ce contexte, le rapport « Decoding Global Talent 2024 » de BCG, The Network et The Stepstone Group, basé sur une enquête auprès de plus de 150 000 personnes dans 188 pays, offre des perspectives précieuses sur les préférences et les attentes des talents. Qu’en est-il spécifiquement du Maroc ? Plongeons dans les données pour décrypter ce qui motive et attire les talents marocains aujourd’hui.

1. Une adoption remarquable de l’IA générative

L’un des enseignements les plus frappants concernant le Maroc est son taux d’adoption élevé de l’IA générative. L’étude révèle que 52% des répondants marocains utilisent régulièrement l’IA Gen (au moins quelques fois par mois). Ce chiffre place le Maroc au 4ème rang mondial dans cette enquête, loin devant de nombreuses économies développées comme les États-Unis (41%), le Royaume-Uni (33%), l’Allemagne (32%) ou la France (29%).

Cette adoption rapide s’inscrit dans une tendance observée dans plusieurs économies émergentes, qui semblent embrasser cette technologie plus vite que les pays occidentaux. L’analyse des « personas » GenAI suggère également que les utilisateurs marocains, comme ceux d’autres pays en développement, pourraient comprendre des proportions plus importantes d’utilisateurs avancés (« Colleague » et « Expert ») par rapport aux économies occidentales. Cela témoigne d’une curiosité technologique et d’une volonté d’intégrer ces nouveaux outils dans leur quotidien professionnel et personnel.

2. Priorités au travail : stabilité, croissance et impact

Si la sécurité de l’emploi est devenue la priorité numéro un au niveau mondial pour la première fois, les préférences varient selon les régions. Pour les talents de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), dont le Maroc fait partie :

  • La réputation et la stabilité financière de l’employeur sont des critères particulièrement importants.
  • Les opportunités de développement de carrière, de leadership et de prise de responsabilités sont également très valorisées.
  • Contrairement à l’Europe où l’équilibre vie pro/vie perso est roi, ce critère semble moins prioritaire dans la région MENA.

En ce qui concerne les « deal breakers » (les facteurs rédhibitoires qui pousseraient un talent à refuser une offre attrayante), les répondants de la région MENA citent principalement :

  • Un impact négatif de l’entreprise sur la société (42%).
  • Un manque d’environnement diversifié ou inclusif (36%).
  • Une impression négative lors des entretiens (34%).

Ces éléments soulignent l’importance croissante des valeurs de l’entreprise et de l’expérience candidat pour attirer les talents marocains.

3. Une forte volonté d’adaptation et de reconversion (Reskilling)

Face aux changements induits par l’IA Gen, les talents marocains montrent une grande lucidité et une volonté d’adaptation. Si peu craignent une disparition totale de leur emploi (seulement 5% au niveau mondial), une majorité anticipe une transformation de leurs tâches nécessitant de nouvelles compétences. Les Marocains semblent conscients de cet impact potentiel, comme en témoigne leur classement dans l’analyse par pays de la perception de l’impact de l’IA Gen.

Cette prise de conscience se traduit par une forte disposition à la reconversion professionnelle (reskilling). 65% des répondants marocains se déclarent prêts à se former pour rester compétitifs (« Oui, dans tous les cas »), un taux supérieur à la moyenne mondiale (57%) et bien au-dessus de nombreux pays européens. Cette volonté est souvent corrélée à l’importance accordée à la sécurité de l’emploi à long terme et à la perception de l’impact de l’IA.

Le principal besoin exprimé pour réussir cette reconversion est de mieux comprendre quelles compétences acquérir, suivi par une meilleure disponibilité des programmes de formation et un soutien accru de l’employeur.

Implications pour les entreprises

Les résultats de l’étude BCG dessinent le portrait d’un vivier de talents marocains dynamiques, à l’aise avec la technologie, ambitieux et prêts à apprendre. Pour les entreprises cherchant à attirer et retenir ces profils, plusieurs pistes se dégagent :

  • Mettre en avant la stabilité et les perspectives de croissance de l’entreprise.
  • Offrir des opportunités claires de développement de carrière et de prise de responsabilités.
  • Investir dans des programmes de formation et de reskilling pertinents, notamment autour des compétences liées à l’IA, et aider les employés à identifier les compétences d’avenir.
  • Communiquer sur les valeurs de l’entreprise, son impact sociétal positif et ses engagements en matière de diversité et d’inclusion.
  • Soigner l’expérience candidat lors du processus de recrutement.
  • Reconnaître et valoriser la proactivité technologique des talents marocains en intégrant l’IA Gen de manière réfléchie pour améliorer l’efficacité et la satisfaction au travail.

En conclusion, le Maroc se positionne comme un réservoir de talents particulièrement intéressants à l’ère de l’IA générative. Leur forte adoption des nouvelles technologies, combinée à une volonté d’apprendre et de grandir, en fait des collaborateurs précieux pour les entreprises prêtes à investir dans leur potentiel et à répondre à leurs attentes en matière de stabilité, de développement et de valeurs.

Cet article est basé sur les résultats du rapport « Decoding Global Talent 2024 » de BCG, The Network et The Stepstone Group, publié en juin 2024.